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Des représentations en santé mentale

Dre Christine Grou, psychologue et présidente de l’Ordre des psychologues du Québec - presidence@ordrepsy.qc.ca


Forum Adultes et santé mentale

Les 28 et 29 octobre derniers, à l’invitation de la ministre de la Santé et des Services sociaux, Danielle McCann, et de la ministre responsable des Aînés et des Proches aidants, Marguerite Blais, j’ai pris part au forum Adultes et santé mentale qui s’est tenu à Québec dans la foulée des consultations devant mener à l’élaboration par le gouvernement d’un nouveau plan d’action en santé mentale.

Les deux ministres avaient convié 250 personnes issues de divers milieux, parmi lesquelles se trouvaient des psychologues cliniciens, des psychiatres, des intervenants du réseau de la santé, du milieu communautaire, des experts cliniques et des chercheurs, de même que des membres des familles et des personnes utilisatrices de services (aussi appelés « patients partenaires »). Au cœur des préoccupations exprimées lors des discussions, quelques constats se sont imposés : d’abord le besoin d’un meilleur accès à la psychothérapie, maintes fois souligné. De plus, les patients partenaires ont demandé que les services en santé mentale soient repensés afin que leur parcours devienne moins administratif, plus clinique, et se module à leurs besoins réels, sans les astreindre à des programmes prédéfinis. Ils ont également fait valoir le souci de recevoir une réelle écoute et de sentir que leur souffrance est reconnue par le professionnel. Ils ont aussi exprimé le besoin de ne pas ressentir qu'on les laisse tomber dès qu’ils se sentent mieux.

J’ai profité de cette occasion de prise de parole pour sensibiliser les autorités et les intervenants à des enjeux et des préoccupations qui me sont régulièrement exprimés. J’ai surtout insisté sur l’importance de l’espace narratif et de la continuité des soins qui permettent d’établir une relation thérapeutique indispensable au mieux-être et à la meilleure compréhension possible des personnes qui souffrent de troubles mentaux. J’ai à plusieurs reprises souligné l’importance d’interventions qui répondent aux besoins réels des personnes plutôt qu’à des programmations cliniques qui ne sont pas toujours adaptées aux besoins. J’ai également pu mentionner qu’une vision inclusive des besoins dans l’organisation des services est essentielle. Que, pour répondre aux besoins de la population, il faut une offre décentralisée et une diversité de services inscrits dans un continuum depuis la prévention jusqu’à l’intervention. Qu’il ne faut pas négliger l’information et l’éducation des personnes touchées, et qu’il il faut s’assurer qu’elles sont au fait des tenants et aboutissants de leur état, leur trouble ou leur maladie, qu’elles le comprennent, de même qu’elles comprennent les soins qu’elles reçoivent.

J’ai martelé le besoin d’avoir un accès réel à la psychothérapie, gratuit et en temps opportun. J’ai aussi réclamé, à l’instar d’un grand nombre de participants à ce forum, du soutien pour les proches aidants et les intervenants qui jouent des rôles fondamentaux auprès des personnes vivant avec un trouble de santé mentale. Ils font partie de la solution, mais sont trop souvent aux prises avec l’épuisement ou le découragement, et à risque de souffrir de détresse psychologique à leur tour.

Programme québécois pour les troubles mentaux (PQPTM)

Lors d’une conférence de presse en clôture du forum, les ministres McCann et Blais ont conjointement annoncé le déploiement du Programme québécois pour les troubles mentaux (PQPTM) d’abord dans cinq régions, puis dans tout le Québec en mars 2020. Nous sommes conscients que ce déploiement n’est pas sans causer des inquiétudes et qu’il fait naître des questionnements chez les psychologues, notamment ceux qui exercent dans le réseau de la santé.

Je tiens à rappeler le rôle de l’Ordre auprès du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) dans ce dossier. Nous avons été consultés pour les travaux d’adaptation des concepts cliniques des guides aux activités réservées par la loi, par exemple pour départager ce qui est de la psychothérapie des interventions qui n’en sont pas. Dans nos représentations, nous avons voulu nous assurer que le jugement clinique des psychologues soit respecté dans le choix de l’offre de services et que les besoins de la personne soient considérés afin d’y répondre adéquatement et en temps opportun. L’Ordre compte une psychologue déléguée au sein d’un comité du MSSS qui inclut des représentants de la plupart des ordres professionnels dont les membres peuvent exercer la psychothérapie. Toutes les conclusions émises par ce comité ont été jusqu’ici retenues.

Tout indique que les psychologues seront mis à contribution pour évaluer les troubles mentaux dans le cadre du programme. Le PQPTM étant en voie de s’imposer dans les trajectoires de soins, les psychologues ont tout intérêt à prendre connaissance du programme de même que des guides de pratique sur lesquels ils pourront s’appuyer pour exercer la profession dans le respect d’une offre de services adéquate.

Collectif pour une stratégie nationale en prévention du suicide

Notons qu’au terme de ce forum riche en échanges, les deux ministres ont également annoncé que le gouvernement irait de l’avant avec l’élaboration d’une stratégie québécoise de prévention du suicide telle que l’a réclamée le Collectif pour une stratégie nationale en prévention du suicide. L’Ordre avait joint sa voix à ce collectif, il s’agit donc d’une excellente nouvelle et nous allons suivre de près l’évolution de ce projet.