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Une hausse inévitable

Dre Christine Grou, psychologue et présidente de l’Ordre des psychologues du Québec - presidence@ordrepsy.qc.ca


Le 26 octobre dernier, réunis en assemblée générale, les membres ont approuvé une augmentation de la cotisation annuelle. Voici pourquoi.

Ce n’est jamais de gaieté de cœur que les administrateurs se résignent à demander une hausse de la cotisation. Un coup d’œil derrière en témoigne, avec toutes les années où la cotisation n’a pas varié d’un sou. Mais il arrive aussi qu’il soit inévitable d’y recourir.

Tous les psychologues sont en droit de comprendre ce qui justifie la hausse demandée, d’autant qu’elle succède à celle de l’an dernier. Il m’importait donc ainsi qu’aux administrateurs de l’expliquer clairement en assemblée générale, et en toute transparence.

Je l’ai fait, après avoir présenté l’ensemble des dossiers menés par l’Ordre, ses représentations, ses relations et son travail auprès des différents ministères et des organismes gouvernementaux, auprès des autres ordres professionnels de la santé mentale et des relations humaines, auprès du public et auprès de vous, ses membres.

J’ai rappelé que toutes ses actions s’inscrivaient dans la poursuite des objectifs de la planification stratégique adoptée en début d’année. Elles répondent en effet aux grandes orientations, particulièrement celles d’assurer au public l’accessibilité aux services psychologiques et de confirmer le rôle de l’Ordre à titre d’organisation phare en santé mentale et psychologique.

Nous savons que certaines perceptions persistent, comme celle voulant que les psychologues paient pour les psychothérapeutes. Je vous rassure, il n’en est rien : la délivrance et la gestion du permis de psychothérapeute sont entièrement financées par ceux et celles qui le détiennent. Ils ont d’ailleurs la même proportion d’augmentation que les psychologues, soit 7,9 %.

D’autres encore croient que l’Ordre devrait restreindre ses dépenses. Pourtant, tous les postes budgétaires sont scrutés à la loupe, un exercice mené avec diligence tant par le comité exécutif que par le conseil d’administration et par le comité de vérification, qui veillent tous au grain, et jusqu’à l’Office des professions qui s’assure que l’Ordre dépense bel et bien pour la protection du public et non en futilité.

Des mesures d’économie ont été prises, comme le retrait de la base de données EBSCO, déficitaire faute d’un nombre suffisant d’abonnés, la production de quatre numéros papier du magazine Psychologie Québec plutôt que six, la fin des cartes de membres plastifiées ou encore, l’implantation d’un projet pilote d’avocate en résidence au bureau du syndic pour diminuer les honoraires versés à des firmes externes.

En assemblée générale, j’ai d’ailleurs rappelé que 66 % du montant de l’augmentation de l’année dernière a finalement été consacré à la discipline. Il est vrai que les coûts ont explosé depuis quelques années, notamment avec la création en 2015 du Bureau des présidents des conseils de discipline, ce qui a augmenté de manière importante la cadence de la tenue des audiences disciplinaires.

Toutefois, je vous rassure ici encore : la situation se stabilise, le retard est pratiquement rattrapé et les délais sont beaucoup moins longs. Par ailleurs, malgré un nombre de plaintes relativement stable, le nombre de jours d’audiences disciplinaires requis pour les traiter a augmenté en flèche, pour des raisons très souvent hors de notre contrôle. Vous devez aussi savoir que 11 % seulement des dossiers d’enquête et de discipline se partagent 50 % des coûts.

La déclinaison de l'augmentation

Une réforme qui affecte les ordres professionnels

Cette réforme du Code des professions, survenue à la suite de la commission Charbonneau, bouscule la gouvernance des ordres professionnels en imposant, entre autres, une direction générale. L’an dernier, nous l’avions prévue au budget pour les six derniers mois de l’exercice. L’adoption du projet de loi ayant été retardée, cette somme a finalement été transférée… à la discipline. La nouvelle direction générale devra finalement être en place dès le printemps, une dépense majeure et incontournable.

De moins en moins de nouveaux membres

En mars 1998, l’Ordre comptait 6 199 membres. Cinq ans plus tard, il y en avait 1 000 de plus et 1 000 autres encore après les six années suivantes. Depuis 2009, 340 membres seulement se sont ajoutés. La croissance du membership a longtemps permis à l’Ordre de faire face à ses obligations, lesquelles ne varient pas selon le nombre de psychologues. Mais la situation a changé : entre 2013 et 2017, l’Ordre a accueilli en moyenne 227 nouveaux membres par année, mais, toujours en moyenne, 165 l’ont aussi quitté chaque année.

Aujourd’hui, 7 % des membres (plus de 600!) ont plus de 70 ans et l’obligation légale de formation continue en psychothérapie pourrait bien hâter le départ à la retraite de centaines d’entre eux, ce qui n’est pas sans conséquences importantes sur les finances de l’Ordre.

Il n’y a pas que les membres qui vieillissent!

La planification de la relève est un enjeu de saine gestion que l’Ordre a la responsabilité de prévoir. Le taux de roulement du personnel de l’Ordre est très faible, mais certains approchent de l’âge de la retraite. Le défi du transfert de connaissances se pose rapidement, ne serait-ce que pour maintenir la notoriété de l’Ordre et de la profession et son rôle d’organisation phare en santé mentale et psychologique.

L’inévitable coût de la vie

L’Ordre ne peut s’y soustraire : ses dépenses de fonctionnement augmentent inéluctablement. Il faut donc prévoir chaque année l’indexation de celles-ci à la hauteur de l’indice du coût de la vie. Il faut aussi compter dans ce poste certaines dépenses supplémentaires comme la gestion de la fin de la première période de référence pour la formation continue obligatoire, laquelle a été beaucoup plus exigeante que prévu, ne serait-ce que par le nombre de membres qui tardent à s’y conformer.

Malgré tout ce qui précède et qui explique pourquoi une augmentation est essentielle, vous vous doutez bien que j’aurais tout fait pour ne pas avoir à vous la demander. La réalité est autre et il serait déraisonnable, voire insensé, pour moi comme pour les administrateurs, de ne pas y faire face avec l’attention qu’elle commande, avec une vision réfléchie de l’avenir de l’Ordre et respectueuse de celui de la profession.

Après nos explications, l’assemblée générale annuelle a voté majoritairement pour une augmentation de 50 $, un choix qu’elle a fait aussi, j’en suis persuadée, pour préserver la notoriété de notre profession et pour la voir rayonner.