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Thérapie relationnelle parent-enfant : l’apport de la neurobiologie interpersonnelle

Dre Fanny-Maude Urfer, psychologue au CIUSSS de l'Est-de-l'Île-de-Montréal et en pratique privée


Un psychologue intervenant fréquemment auprès des dyades parent-enfant souhaite fournir de la documentation aux parents visant à mieux leur expliquer les bénéfices de la thérapie relationnelle parent-enfant et de la neurobiologie interpersonnelle.  

Des études portant sur la neurobiologie interpersonnelle ont démontré l’efficacité de certains processus thérapeutiques permettant le développement de nouveaux réseaux neuronaux. Beijan (2020) propose une revue de documentation visant à illustrer la compatibilité de la neurobiologie interpersonnelle et de différentes approches thérapeutiques dans un contexte de thérapie relationnelle parent-enfant.

La thérapie relationnelle parent-enfant (TRPE) en 10 séances, selon un modèle soutenu empiriquement et inspiré d’une thérapie filiale, vise à améliorer la relation parent-enfant et à venir en aide aux enfants en enseignant aux parents comment devenir un agent thérapeutique dans la vie de leur enfant. Un groupe de 6 à 8 parents est constitué afin d’assurer un soutien et de transmettre des enseignements (développement de l’enfant, aptitudes relationnelles, techniques parentales visant à améliorer la relation parent-enfant par l’empathie et l’écoute réflexive). Ces aptitudes sont mises en pratique à la fois dans le groupe et durant le temps de jeu de 30 minutes avec l’enfant.

L’un des premiers enseignements offerts aux parents concerne l’approche centrée sur l’enfant en pratiquant un intérêt authentique envers eux, sans intention cachée, en gardant en tête des mantras axés sur une attitude de présence. Cela ouvre la porte à une expérience réparatrice pour l’enfant en exacerbant la proximité et le sentiment de sécurité au sein de la relation parent-enfant.

En groupe, les parents partagent leurs inquiétudes et réalisent qu’ils ne sont pas les seuls à les vivre. Le groupe permet une expérience cathartique par l’exploration d’émotions demeurées jusqu’alors inexprimées. L’acceptation et la présence relationnelle envers autrui sont transposées auprès de l’enfant par une présence émotionnelle plus accrue dans le jeu.

La neurobiologie interpersonnelle est une approche multidisciplinaire portant sur le fonctionnement du cerveau, de la pensée et des relations humaines. Elle permet une meilleure compréhension des relations interpersonnelles, de la santé mentale et de certains dysfonctionnements mentaux. Grâce à la compréhension des structures cérébrales, il devient possible de mieux comprendre les connexions neuronales et leur influence sur le comportement humain.

La neurobiologie interpersonnelle a des implications dans les différentes sphères de la TRPE.

D’abord, en ce qui a trait à la thérapie par le jeu, la neurobiologie interpersonnelle procure une compréhension de son efficacité, des facteurs de développement associés et de ses implications relationnelles. Cette approche multidisciplinaire met en lumière le développement du cerveau (du simple vers le complexe), ce qui explique l’inadéquation des interventions exclusivement verbales pour les enfants. Le jeu permet de miser sur des processus relationnels, kinesthésiques et non verbaux par lesquels les enfants perfectionnent leur sens inné de l’expression, ce qui encourage le développement sain de leur système nerveux et de leurs capacités d’autorégulation émotionnelle. Grâce au sentiment de sécurité émanant de la relation thérapeutique, l’enfant ose explorer librement ses émotions, favorisant l’apprentissage et le changement, puisqu’il peut ainsi se construire une saine compréhension du monde relationnel. L’enfant devient conscient de ses expériences implicites et de ses souvenirs explicites, lesquels s’intègrent par le jeu. Dans la relation parent-enfant, l’attachement sécurisé se trouve facilité et crée une base solide pour le développement cérébral.

Ensuite, en ce qui a trait à la thérapie de groupe, elle constitue un contexte unique pouvant susciter, amplifier, contenir et offrir une résonnance par rapport à diverses expériences humaines, ce qui crée des conditions favorables pour les changements cérébraux. La liberté de modifier l’expérience des souvenirs douloureux ou traumatiques en explorant leurs aspects implicites et explicites, et ce, tout en bénéficiant de la réponse régulée et empathique du groupe, éveille les émotions de façon modérée et permet ainsi la neuroplasticité nécessaire à l’altération de ces expériences. Les parents vivant la guérison de leurs expériences implicites sont plus à même de devenir des agents de guérison des expériences implicites de leurs propres enfants.

Finalement, en ce qui a trait au volet de psychoéducation, la neurobiologie interpersonnelle appliquée à la TRPE permet aux clients de mieux comprendre leurs propres processus neurologiques et ceux de leurs enfants, ce qui peut réduire le niveau de détresse et améliorer les résultats de l’intervention.

En guise d’exemples, un concept de la TRPE lié à la neurobiologie interpersonnelle concerne les attitudes d’« être avec » par des réponses réflexives aidant l’enfant à se sentir compris. Ceci aide le cerveau de l’enfant à fonctionner comme un tout calme et intégré, à développer un locus de contrôle interne et à maintenir sa régulation émotionnelle. Un exemple de neuroéducation concerne le fait de maintenir une ambiance émotionnelle propice en répondant aux situations plutôt qu’en y réagissant, ce qui favorise l’activation du cortex cérébral en évitant certaines réactions (lutter, fuir ou figer).

En somme, les mécanismes thérapeutiques de la TRPE sont inspirés de la neurobiologie interpersonnelle et appuyés par ses théories, ce qui en fait des interventions soutenues et prometteuses.
 

Bibliographie

Beijan, L. L. (2020). Incorporating interpersonal neurobiology in child parent relationship therapy. International Journal of Play Therapy, 29, 65-73.
Article repéré à : http://dx.doi.org/10.1037/pla0000113