Méta-analyse : diagnostic de TDA/H posé durant l’enfance et risque d’évolution vers des enjeux psychiatriques à l’âge adulte
Un psychologue évalue une jeune fille dans un état de grande souffrance psychologique avec idéations suicidaires. Il se questionne quant à différentes hypothèses diagnostiques dans un contexte de difficultés importantes à l’école et dans la sphère sociale.
Le trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDA/H) s’inscrit dans les troubles neurodéveloppementaux qui se manifestent dès l’enfance. Il est caractérisé soit par un profil hyperactif-impulsif ou par des comportements d’inattention. Se trouvant parmi les troubles neurodéveloppementaux les plus prévalents, le TDA/H s'accompagne de difficultés sur le plan du fonctionnement exécutif, de l’attention et du comportement. Ce diagnostic peut évoluer différemment d’un individu à l’autre, allant d’une rémission nulle à complète avec le temps. Dans la majorité des cas, on assiste à une rémission partielle avec certains symptômes persistants. Des diagnostics comorbides peuvent être recensés à l’âge adulte, tels que des abus de substance, des troubles de l’humeur (anxio-dépressifs) ou des troubles dans le registre antisocial (trouble des conduites ou trouble de la personnalité antisociale), ce qui suscite des problèmes de fonctionnement et augmente les risques suivants : inhabileté au travail, délinquance, événements de vie négatifs, enjeux suicidaires et décès prématuré. Ceci soutient l’importance d’interventions survenant rapidement dans la vie de l’enfant pour viser un pronostic plus positif.
Une méta-analyse de Van der Plas, Noordermeer, Oosterlaan et Luman (2025) se penche sur les diagnostics de TDA/H posés durant l’enfance et met en lumière les facteurs de risque d’une évolution vers des enjeux psychiatriques à l’âge adulte, puisque ces derniers sont alors 2,5 fois plus probables.
À partir de 36 études retenues et analysées (dont 2 études longitudinales), on observe que le maintien des symptômes du TDA/H dans le temps est souvent associé à un historique de traitement par les psychostimulants. Un score de quotient intellectuel élevé constitue, au contraire, un facteur de protection et apparaît corrélé à la diminution des symptômes de TDA/H au fil du temps. À noter que ni la sévérité des symptômes de TDA/H durant l’enfance ni un diagnostic de trouble d’opposition ou de trouble des conduites chez les jeunes garçons ne sont nécessairement associés au maintien des symptômes à l’âge adulte.
Dans les cas où le diagnostic de TDA/H persiste à l’âge adulte, on recense un risque accru d’abus de substance et de dépression majeure, quoique ce dernier diagnostic pourrait être moins probable dans un contexte de traitement par les psychostimulants durant l’enfance. Il y aurait intérêt à mener plus d’études afin de mieux comprendre le lien entre le TDA/H et 1) les troubles anxieux; 2) les problèmes sociaux; et 3) le statut socioéconomique. Les facteurs génétiques, environnementaux et psychologiques gagneraient également à être étudiés davantage pour une meilleure compréhension de l’étiologie du TDA/H.
Une étude de cas présentée par Toole et Frank (2024) illustre le fait qu’une partie des diagnostics de TDA/H sont établis après l’âge de 12 ans, bien que la plupart le soient plus tôt au cours du développement. Elle met en lumière l’importance d’identifier certains symptômes du TDA/H qui peuvent passer inaperçus, surtout chez les jeunes filles, afin de prévenir la survenue d’enjeux sociaux ou scolaires. En effet, le TDA/H peut se présenter avec 1) une prédominance de l’inattention; 2) une prédominance de l’hyperactivitéimpulsivité; ou 3) une combinaison. Le diagnostic du TDA/H est complexifié par la comorbidité élevée avec les troubles anxiodépressifs.
Il ressort de l’étude de cas que les problèmes dans la sphère sociale et le déclin des résultats scolaires auraient été attribués dans un premier temps à la transition du primaire au secondaire, un diagnostic de trouble d’anxiété généralisé ayant déjà été posé à l’âge de 7 ans (avec traitement psychothérapique). La situation aurait finalement été attribuable à des difficultés d’attention, à partir 1) de l’histoire clinique; 2) des entrevues menées; et 3) de l’évaluation standardisée. La difficulté diagnostique relève de l’insuffisance de l’administration d’un seul test pour identifier un TDA/H et de la comorbidité de troubles, qui peut dissimuler certains symptômes. On estime qu'une forte proportion (plus de 60%, selon certaines études) des jeunes ayant reçu un diagnostic de TDA/H présentent au moins un autre trouble comorbide mental, émotionnel ou comportemental avec une symptomatologie s’apparentant à celle du TDA/H; les symptômes anxio-dépressifs sont les plus fréquemment recensés. Notamment, les enfants atteints d’un trouble de l’humeur présentent également des changements de l’humeur rapides, des débordements émotionnels, de l’agitation, une tendance au bavardage et une impatience extrême.
Dans le cas de cette jeune fille de 12 ans, un volet de médication et des services de psychothérapie auraient été proposés par le psychiatre traitant, améliorant l’humeur et les interactions sociales, puis soutenant l’amélioration des résultats scolaires. L’approche multimodale est préconisée, et cette étude de cas souligne l’importance de considérer tous les symptômes du TDA/H, particulièrement ceux qui concernent l’inattention, car ils passent souvent inaperçus chez les jeunes filles. Or, la prise en charge rapide peut améliorer le rendement scolaire et le bien-être général des jeunes atteints de ce trouble.
Bibliograhie
- Toole, K. P. et Frank, C. (2024). A young adolescent with undiagnosed ADHDinattentive presentation and co-morbid anxiety and depression : A case report. Journal of Pediatric Nursing, 78, E250-E259. https://www.doi.org/10.1016/j. pedn.2024.07.013
- Van der Plas, N. E., Noordermeer, S. D. S., Oosterlaan, J. et Luman, M. (sous presse). Systematic review and meta-analysis : Predictors of adult psychiatric outcomes of childhood attention-deficit/hyperactivity disorder. Journal of the American Academy of Child & Adolescent Psychiatry. https://www.doi.org/10.1016/j. jaac.2025.04.012